AI Overviews : le déploiement mondial qui inquiète et qui fascine

Google a bouleversé son moteur de recherche en y intégrant une nouvelle fonctionnalité baptisée AI Overviews (ou « aperçus IA »).

DAte

2 déc. 2025

Catégorie

SEO

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10min


Déployée progressivement depuis 2023, cette innovation suscite des réactions contrastées à travers le monde – entre engouement des usagers pour la rapidité des réponses et vives inquiétudes des éditeurs de contenus face à une possible chute du trafic web. Ce gros plan revient sur le lancement géographique des aperçus IA, les premiers retours d’expérience (des tweets moqueurs aux critiques d’experts SEO), les positions des régulateurs aux États-Unis et en Europe, ainsi que les conséquences pressenties pour la presse en ligne et les revenus publicitaires. Enfin, nous envisagerons les perspectives à moyen terme de cette transformation de la recherche en ligne.

Un déploiement progressif, des États-Unis à l’Asie

Google a d’abord lancé son expérience de recherche par IA aux États-Unis en 2023, via son programme Search Labs, en réaction à la concurrence naissante de Bing (Microsoft) et des agents conversationnels comme ChatGPT. Après plusieurs mois de tests, la firme a annoncé à la conférence I/O 2024 que les AI Overviews seraient déployés pour tous les utilisateurs américains, avec une expansion mondiale planifiée d’ici fin 2024[1]. Concrètement, dès mai 2024, des centaines de millions d’internautes ont pu voir ces encarts de réponse IA en haut de leurs recherches, Google prévoyant d’atteindre plus d’un milliard d’utilisateurs couverts en quelques mois[2].

En parallèle, les premiers déploiements hors USA ont eu lieu à l’été 2023. Fin août, Google a activé ses réponses IA en Inde et au Japon, ses deux premiers marchés internationaux tests[3]. Les internautes japonais peuvent y poser des questions en langue locale, tandis qu’en Inde le système fonctionne en anglais et hindi[4]. S’ensuivent une extension à d’autres pays : dès novembre 2023, l’expérience a été ouverte à plus de 120 pays et à de nouvelles langues (espagnol, coréen, etc.), marquant une internationalisation rapide de la recherche générative[5][6]. Google estime que cette évolution répond à de nouveaux usages et « prend en charge le travail de recherche à votre place »[7], misant sur un modèle d’IA maison (Gemini) intégré à son moteur.

Exemple d’aperçu IA généré par Google en haut de la page de résultats (ici, une question complexe sur la cuisine). L’encadré fournit une synthèse en langage naturel, accompagnée de liens vers les sources pour “creuser” le sujet[8]. L’objectif affiché est de faire gagner du temps à l’internaute en lui évitant de parcourir manuellement plusieurs sites web.


Des utilisateurs entre enthousiasme et perplexité

Du côté des usagers, l’accueil de ces réponses assistées par IA est mitigé. Certains apprécient de pouvoir « obtenir un aperçu rapide d’un sujet tout en accédant aux liens pour en savoir plus », à tel point que Google affirme que les utilisateurs « utilisent davantage la recherche et sont plus satisfaits des résultats » depuis l’introduction des aperçus IA[9]. En phase de test, la fonctionnalité a été employée des milliards de fois et la société note que les internautes visiteraient même une plus grande diversité de sites lorsqu’ils posent des questions complexes grâce à l’IA[10].

Cependant, de nombreux retours d’expérience négatifs font surface en parallèle. Sur les réseaux sociaux, des captures d’écran virales ont tourné en dérision les réponses farfelues ou erronées de l’IA. Exemple emblématique : à la question d’un internaute agacé que le fromage glisse de sa pizza, Google a répondu de « mélanger environ 1/8 de tasse de colle blanche non toxique dans la sauce »[11] pour fixer le tout – une recommandation absurde qui a immédiatement fait le tour du web. Dans le même registre, les aperçus IA ont un temps affirmé que l’ancien Président américain James Madison avait été diplômé 21 fois de l’Université du Wisconsin, ou encore qu’un chien aurait joué en NBA, NFL et NHL[12]. L’une des réponses générées suggérait même aux utilisateurs d’avaler chaque jour des cailloux pour une raison obscure, aux côtés du conseil de la pizza à la colle[13]. Ces hallucinations de l’IA – souvent issues de données aberrantes glanées sur Internet – ont suscité moqueries et inquiétudes quant à la fiabilité du moteur.

Google a reconnu que de telles erreurs pouvaient survenir, tout en les qualifiant de cas extrêmes. La plupart de ces ratés proviennent de requêtes très peu courantes, a expliqué un porte-parole, et « ne représentent pas la majorité de l’expérience des utilisateurs »[14]. La firme a apposé la mention « Generative AI is experimental » (IA générative expérimentale) sous chaque réponse, et affirme apporter des correctifs rapides dès qu’une bourde est signalée[14]. Face au bad buzz de la pizza à la colle, Google a même temporairement désactivé l’aperçu IA sur certaines requêtes sensibles, le temps de renforcer ses garde-fous techniques[15]. Malgré ces mesures, l’épisode a alimenté le doute : « À quoi bon l’IA si le moteur paraît plus bête qu’avant ? », s’interrogeait une journaliste tech américaine, soulignant que ces réponses automatiques « livrent des âneries plus vite que jamais »[16][11]. L’enthousiasme pour la nouveauté se teinte donc de prudence chez de nombreux internautes, qui apprécient la commodité du système tout en pointant ses limites qualitatives.

Vives inquiétudes chez les experts du référencement

Du côté des professionnels du web et du marketing, les réactions oscillent entre fascination et alerte rouge. Pour la communauté SEO (optimisation pour les moteurs de recherche), habituée à s’adapter aux mises à jour de l’algorithme Google, l’arrivée de ces réponses génératives a sonné comme un énième défi – potentiellement bien plus disruptif. « C’est déjà assez dur de suivre les changements de l’algorithme, et voilà qu’un nouvel aspirateur à trafic fait son apparition », résume un consultant. En effet, beaucoup perçoivent les aperçus IA comme un « siphon à clics » : si l’IA répond directement à la question de l’utilisateur, celui-ci n’a plus besoin de cliquer sur les résultats organiques (les liens bleus traditionnels). « Le petit trafic qu’on reçoit encore aujourd’hui sera encore diminué », redoute Danielle Coffey, directrice de l’alliance News/Media qui regroupe des éditeurs de presse aux États-Unis[17]. Elle juge ce changement « catastrophique » pour la visibilité des sites d’information et y voit « une forme perverse d’innovation : Google utilise nos contenus pour alimenter un produit qui concurrence directement nos sites »[17].

Google, de son côté, s’en défend et assure que l’effet pourrait être inverse. Sundar Pichai, le PDG de la compagnie, a récemment affirmé que « lorsqu’on fournit du contexte aux gens, cela les incite aussi à explorer plus », arguant que donner une réponse synthétique ne les empêche pas de cliquer ensuite sur les sources citées[18]. Selon lui, les aperçus IA exposeraient l’internaute à plus de points de départ (jumping-off points) pour approfondir un sujet, et non l’inverse. Néanmoins, cette assurance peine à convaincre les spécialistes du search marketing tant que Google ne fournit pas de données concrètes. Interrogé sur la baisse éventuelle du taux de clic sortant, M. Pichai est resté évasif, évoquant un équilibre à trouver « sans créer de failles exploitables »[19]. En l’absence de transparence, le doute l’emporte chez les éditeurs : des études tierces indiquent déjà que le taux de clic moyen s’écroule lorsque l’IA intervient en tête des résultats (8 % des gens cliquent sur un lien quand un résumé IA est présent, contre 15 % lorsqu’il n’y en a pas)[20]. Ces chiffres laissent craindre une baisse significative du trafic organique, donc des revenus publicitaires, pour de nombreux sites.

Face à ce bouleversement, les experts SEO commencent à s’organiser. Le maître-mot : adapter sa stratégie de contenu pour ne pas disparaître. « Il ne sert à rien de paniquer, mieux vaut réfléchir à comment apparaître dans l’aperçu IA », conseille Chima Mmeje, une référence du secteur[21]. Selon elle, les contenus purement informatifs et superficiels (du type « qu’est-ce que… », « comment faire… ») seront les premiers à se faire avaler par l’IA, qui ne mettra en avant que « le gagnant tout en haut, tandis que tous les autres se battent pour des miettes »[21]. Il va donc falloir produire des pages qui gagnent cette mise en avant, en misant sur l’expertise, l’originalité et la valeur ajoutée. Des consultants suggèrent déjà de privilégier des contenus à forte perspective (analyse, opinion, données exclusives), que l’IA aura plus de mal à résumer sans inciter l’utilisateur à en savoir plus[22][23]. En somme, il s’agit de passer d’une logique de mots-clés à une logique de qualité perçue : Google ne reprend dans son aperçu qu’un extrait de site, souvent celui qu’il juge le plus pertinent ou réputé. « Ce nouvel extrait enrichi va fonctionner un peu comme un super featured snippet, en plus dynamique », estime le stratège Ferdinand Goetzen, qui se veut moins alarmiste[23]. Il rappelle qu’à terme, « ceux qui veulent creuser davantage cliquent toujours sur les sites », et que Google apportait déjà des réponses succinctes via des encadrés sans IA (par exemple convertir des unités, connaître la population d’un pays, etc.). Néanmoins, même les optimistes concèdent que « ce sera une période disruptive pour tous ceux qui dépendent du trafic organique »[24]. Une nouvelle course s’engage donc entre Google et les créateurs de contenu pour conserver la visibilité* dans ce paysage bouleversé.

La presse contre-attaque : des procès aux USA, une fronde en Europe

Aux États-Unis, premières actions en justice des éditeurs

Les groupes de presse et créateurs de contenu n’entendent pas laisser Google remodeler le web sans réagir. Aux États-Unis, l’alliance News/Media (qui représente de nombreux journaux) a ouvertement critiqué les aperçus IA dès leur lancement, et certains éditeurs passent à l’offensive judiciaire. En septembre 2025, Penske Media, propriétaire de magazines emblématiques (Rolling Stone, Variety, Billboard), a déposé la première plainte majeure contre Google pour cette fonctionnalité[25]. Penske accuse le moteur de puiser dans les articles de presse sans autorisation afin de générer des synthèses qui retiennent les lecteurs sur Google, privant ainsi les sites de visites. Selon la plainte, le modèle économique traditionnel – où les éditeurs acceptaient l’indexation de leurs contenus en échange de trafic – est en train d’être brisé : « on doit désormais fournir nos contenus pour alimenter les résumés IA qui remplacent nos visites », résume l’argument[26]. Le groupe affirme que ses revenus d’affiliation auraient chuté d’un tiers par rapport à leur pic, corrélés à une baisse de trafic imputée en partie aux AI Overviews fin 2024[27]. Surtout, les éditeurs soulignent l’impasse dans laquelle Google les place : ils ne peuvent pas se retirer de ces résumés IA sans déréférencer complètement leur site du moteur, ce qui équivaudrait à disparaître du web[28]. « Nous n’avons pas le choix, nous devons être visibles en ligne », résume Renate Schroeder, directrice de la Fédération européenne des journalistes, en écho à ce dilemme[29].

Google rejette les accusations de comportement illégal et a qualifié l’action en justice de Penske de « sans fondement »[30]. Le géant met en avant le volume colossal de trafic qu’il continue d’acheminer vers les sites (plusieurs milliards de clics par jour tous sites confondus) et assure que ses nouvelles expériences IA « créent de nouvelles opportunités pour les contenus et entreprises d’être découverts »[31]. En clair, Google maintient que les aperçus IA vont stimuler de nouvelles recherches des utilisateurs et, à terme, profiter à l’ensemble de l’écosystème. Mais les éditeurs américains demeurent sceptiques, d’autant que leurs propres données racontent une autre histoire : le tabloïd MailOnline (Daily Mail) a observé un effondrement de 56 % du taux de clics sur ses articles lorsque l’IA fournit un résumé dans la page de résultats[32]. De même, l’organisme Digital Content Next rapporte des chutes de trafic pouvant atteindre -25 % pour certains de ses sites membres depuis l’introduction des réponses IA[33]. D’une manière générale, l’étude du Pew Research Center citée plus haut – 8 % de clics seulement avec IA contre 15 % sans – conforte les craintes des médias[20].

L’enjeu dépasse le seul marché américain et pose une question de droit d’auteur inédite : utiliser des articles de presse pour entraîner et alimenter un modèle d’IA relève-t-il du fair use (usage raisonnable autorisé) ou d’une violation nécessitant compensation ? La plainte de Penske, comme celle déposée séparément par la plateforme éducative Chegg plus tôt la même année, pousse ce débat sur le terrain juridique[34]. « Ce sera à la justice de trancher si entraîner une IA et en résumer le contenu constitue un usage loyal », commente un analyste. Si les tribunaux donnent raison aux éditeurs, Google pourrait être contraint de mettre en place un partage de revenus avec les producteurs de contenu repris par l’IA[35]. Dans le cas inverse, craignent les plaignants, « le web ouvert risque de faire les frais de cette évolution », avec un Internet où le trafic et la monétisation seraient de plus en plus captés à l’intérieur de l’écosystème Google[36].

En Europe, une innovation sous haute surveillance réglementaire

En Europe, les AI Overviews ont suscité des réactions encore plus prudentes, voire hostiles, de la part des acteurs institutionnels. Google a dû temporiser pendant de longs mois avant de lancer ses réponses IA sur le Vieux Continent, conscient du cadre juridique plus strict et de la sensibilité accrue aux enjeux de vie privée et de droit d’auteur. Alors que l’outil était disponible dans le reste du monde fin 2024, il n’a été activé qu’au printemps 2025 dans quelques pays européens triés sur le volet[37]. Fin mars 2025, Google a inauguré ses aperçus IA dans huit États membres (dont l’Allemagne, l’Italie, l’Espagne, la Pologne, la Belgique…) ainsi qu’en Suisse, mais a reculé dans d’autres, notamment en France[37]. D’après un responsable de Google, ce lancement partiel s’explique par « l’incertitude réglementaire » liée à la cascade de nouvelles lois numériques européennes : la loi sur les services numériques (DSA) est entrée en vigueur, tout comme le Digital Markets Act (DMA) et bientôt l’AI Act, ce qui *« freine l’arrivée de fonctionnalités innovantes » selon lui[38].

L’Europe a fini par accueillir les aperçus IA en 2025, mais la France fait figure d’exception. La fonctionnalité est disponible dans la plupart des pays européens (Allemagne, Espagne, Italie, etc.) depuis mars 2025[37], tandis que l’Hexagone reste exclu pour l’instant en raison d’« incertitudes juridiques » invoquées par Google[39]. Le contexte réglementaire français, notamment la loi dite des “droits voisins” qui protège les éditeurs de presse, incite le géant américain à la prudence quant au lancement local.

Officiellement, Google admet donc reporter l’activation des aperçus IA en France par précaution juridique. La France applique rigoureusement la directive européenne de 2019 sur les droits voisins, obligeant les plateformes à rémunérer les éditeurs de presse pour l’utilisation d’extraits d’articles. Tant que la question de savoir si un résumé IA constitue ou non un tel extrait protégé n’est pas tranchée, le risque pour Google serait de s’exposer à des sanctions ou à des litiges coûteux. « France remains excluded due to regulatory uncertainties », a confirmé en octobre 2025 un vice-président de Google sur les réseaux sociaux, évoquant implicitement le spectre de la CNIL ou des tribunaux français[40][41]. De fait, la France fait figure d’irréductible village gaulois dans la stratégie globale de Google : c’est quasiment le seul pays occidental où ces aperçus IA ne sont pas disponibles fin 2025[42]. La presse et les éditeurs français, de leur côté, se montrent vigilants et se préparent à repousser voire empêcher l’arrivée de l’outil. La seule façon pour un internaute français d’y accéder est de biaiser via un VPN et une localisation étrangère, note Numerama, signe d’un climat peu favorable au déploiement national[43].

Parallèlement, en Allemagne, en Espagne et dans plusieurs pays, les éditeurs n’ont pas tardé à organiser la résistance à l’échelle européenne. Dès le 18 septembre 2025, une alliance de médias et d’industriels numériques allemands a déposé une plainte contre Google AI Overviews auprès du régulateur allemand des communications (BNetzA)[44]. S’appuyant sur le nouveau Digital Services Act (DSA), pleinement applicable depuis 2024, cette coalition accuse le dispositif d’enfreindre les règles en matière de transparence et de traitement équitable des contenus de presse. Le réquisitoire est sans appel : « Google crée un produit concurrent aux contenus journalistiques et éditoriaux qui prive les entreprises médiatiques de leur audience, réduit leurs revenus publicitaires et menace leur refinancement, le tout en se basant sur des contenus tiers »[45]. En clair, les groupes de médias européens reprochent à Google un détournement de valeur à leur détriment, très similaire aux griefs de leurs homologues américains. S’y ajoute une crainte sur la désinformation : les erreurs factuelles propagées par l’IA (par exemple confondre Airbus et Boeing, ou conseiller de mettre de la colle dans une pizza) inquiètent particulièrement en Europe, où les pouvoirs publics sont en alerte sur les dérives de l’IA générative[46]. Ces gaffes, corrigées a posteriori par Google, illustrent selon eux le « risque systémique » que fait peser l’IA sur la qualité de l’information en ligne.

La Commission européenne, de son côté, a également pris le dossier en main. Bruxelles a confirmé en avril 2025 examiner de près la nouvelle fonction de Google afin de vérifier sa conformité avec plusieurs cadres juridiques : non seulement le DMA (qui interdit aux gatekeepers de privilégier leurs propres services de manière déloyale), mais aussi le droit d’auteur (directive 2019, notamment les exceptions de text and data mining), le DSA sur la transparence des algorithmes, et même le futur European Media Freedom Act visant à protéger le pluralisme des médias[47][48]. « La Commission évalue actuellement le fonctionnement de Google AI Overviews en pratique et ses implications au regard des règles européennes », a déclaré un porte-parole, citant explicitement les lois sur le droit d’auteur, la concurrence déloyale, les obligations des plateformes et la protection du pluralisme[48]. Si aucune procédure formelle n’est encore lancée, cette surveillance s’inscrit dans le cadre plus large d’une enquête sur d’éventuels comportements de self-preferencing de Google – le fait de mettre en avant ses propres services dans les résultats de recherche[49]. Plusieurs éditeurs et associations européens ont parallèlement saisi l’autorité de la concurrence (à Bruxelles et Londres) pour dénoncer un abus de position dominante : ne pas laisser la possibilité de retrait aux éditeurs (sinon en les déréférençant complètement) pourrait constituer un abus, argumentent-ils[50][51]. En juillet 2025, un groupe nommé Independent Publishers Alliance a ainsi déposé une plainte antitrust auprès de la Commission européenne, demandant en urgence des mesures provisoires pour éviter un préjudice irréparable aux éditeurs[52][53]. Là encore, le fait que Google place systématiquement ses réponses de synthèse tout en haut de la page, reléguant les liens des sites en dessous, est perçu comme un avantage indu par rapport aux contenus originaux[54].

Google plaide sa cause en Europe en martelant que les nouvelles expériences IA « permettent aux gens de poser encore plus de questions » et donc de découvrir plus de contenus[31]. La firme souligne envoyer toujours « des milliards de clics vers les sites web chaque jour »[31] et indique même avoir commencé à insérer de la publicité dans les encadrés d’aperçus IA (depuis mai 2025) afin de partager la manne avec les annonceurs, voire à terme avec les créateurs de contenus[55]. Des engagements qui ne calment qu’en partie les autorités : si les enquêtes concluent à des manquements, le DSA prévoit des amendes pouvant aller jusqu’à 6 % du chiffre d’affaires mondial de l’entreprise fautive[56]. En somme, le dossier est scruté au plus haut niveau politique en Europe, où Google joue une partie serrée pour déployer son outil sans déclencher de sanctions.

Conclusion : quel avenir pour la recherche à l’ère de l’IA ?

Un an et demi après les débuts des AI Overviews, la recherche Google est à un tournant de son histoire. Jamais une fonctionnalité n’avait autant fait bouger les lignes entre le moteur, les utilisateurs et l’écosystème du web. D’un côté, la promesse d’une expérience plus fluide – trouver l’essentiel en quelques secondes – s’aligne avec l’évolution des usages et a reçu un certain écho positif du public. De l’autre, les dérives constatées (erreurs factuelles, possibles biais) et la fronde des éditeurs soulignent les écueils d’une intégration précipitée de l’IA sans garde-fous suffisants. À court terme, Google va sans doute s’atteler à améliorer la fiabilité de son système : l’adoption de son modèle Gemini, plus performant, a déjà réduit de 40 % le temps de réponse et amélioré la pertinence d’après la compagnie[57][5]. On peut s’attendre à ce que l’IA progresse encore, éliminant graduellement les réponses fantaisistes qui ont entaché son lancement. La société teste aussi de nouvelles options pour ses aperçus (par exemple la possibilité de simplifier ou détailler le résumé sur commande) et affine l’affichage des sources pour rassurer sur la crédibilité[58][59].

Sur le plan économique et réglementaire, le bras de fer engagé pourrait, lui, durer plus longtemps. Plusieurs procès vont poser la question de la rémunération des contenus utilisés par l’IA : si la justice tranche en faveur des éditeurs, Google sera peut-être contraint de partager une partie de la valeur générée par ses réponses synthétiques[36]. Des solutions de compromis, sous forme d’accords de licence ou de fonds d’aide à la presse, pourraient émerger pour éviter un démantèlement judiciaire. À l’inverse, si Google sort vainqueur légalement, la pression restera forte pour qu’il intègre les éditeurs au modèle d’une manière ou d’une autre, sous peine de voir l’écosystème de l’information s’appauvrir. En Europe, la mise en application du Media Freedom Act en 2025 et de l’AI Act à l’horizon 2026 donnera aux autorités de nouveaux outils pour encadrer ces usages d’IA dans la recherche[47][48]. On pourrait voir imposer plus de transparence (par exemple indiquer quelles données ont servi au résumé, ou permettre aux sites de refuser l’agrégation automatique de leur contenu). Quoi qu’il en soit, tous les observateurs s’accordent à dire que le mouvement vers la recherche assistée par IA est lancé et semble irréversible. « L’IA sera de plus en plus imbriquée dans la recherche, pas l’inverse », note un spécialiste, invitant les entreprises à « surfer sur la vague » plutôt que de la nier[24]. Google lui-même joue gros : la recherche en ligne, son produit phare, est en train de muter sous l’effet de l’IA, et l’entreprise a fait de cette intégration son « plus grand pari » stratégique[60]. La question est de savoir si ce pari profitera à tout l’écosystème ou si Google en récoltera seul les fruits. Entre innovation technologique et équilibres à repenser, l’année à venir sera décisive pour définir à quoi ressemblera l’expérience de recherche – et si elle pourra satisfaire simultanément les attentes du public, les exigences des régulateurs et la survie des éditeurs de contenu.

Sources : blog Google, HubSpot, The Verge, Numerama, Euronews, Reuters, eMarketer, Pew Research, etc.[9][11][17][54][20][48]


[1] [13] [15] [17] [18] [19] [21] [22] [23] [24] What SEO Experts Are Saying About Google’s ‘AI Overviews’

https://blog.hubspot.com/marketing/ai-overviews

[2] [7] [9] [10] [58] [59] Google I/O 2024: New generative AI experiences in Search

https://blog.google/products/search/generative-ai-google-search-may-2024/

[3] [4] Google introduces generative AI to Search in India, Japan | Reuters

https://www.reuters.com/technology/google-introduces-generative-ai-search-india-japan-2023-08-31/

[5] [6] [57] Google’s Search Generative Experience | Navigating SEO and AI

https://noblestudios.com/seo/google-search-generative-experience/

[8] [39] [43] [44] [45] [46] [56] Google face à la fronde, ses résumés IA accusés d’asphyxier la presse et de propager des erreurs - Numerama

https://www.numerama.com/tech/2079759-google-face-a-la-fronde-ses-resumes-ia-accuses-dasphyxier-la-presse-et-de-propager-des-erreurs.html

[11] [12] [14] [16] Google promised a better search experience — now it’s telling us to put glue on our pizza | The Verge

https://www.theverge.com/2024/5/23/24162896/google-ai-overview-hallucinations-glue-in-pizza

[20] [25] [26] [27] [28] [30] [32] [33] [34] [35] [36] Google faces first major publisher lawsuit over AI Overviews

https://www.emarketer.com/content/google-faces-first-major-publisher-lawsuit-over-ai-overviews

[29] [47] [48] [49] Google’s AI Overviews Face Scrutiny Under EU Digital Laws

https://www.medianama.com/2025/04/223-google-ai-overviews-eu-investigation-harms-journalism-publishers/

[31] [50] [51] [52] [53] [54] [55] [60] Exclusive: Google’s AI Overviews hit by EU antitrust complaint from independent publishers | Reuters

https://www.reuters.com/legal/litigation/googles-ai-overviews-hit-by-eu-antitrust-complaint-independent-publishers-2025-07-04/

[37] [38] Google’s AI feature on hold in most EU member states due to ‘strict rules’ | Euronews

https://www.euronews.com/next/2025/04/01/googles-ai-feature-on-hold-in-most-eu-member-states-due-to-strict-rules

[40] [41] AI Mode EU rollout on the night of October 8, 2025 - Xpert.Digital

https://xpert.digital/en/the-new-google-ai-mode-in-europe/

[42] Le nouveau moteur de recherche de Google est disponible partout ...

https://www.numerama.com/tech/2090203-le-nouveau-moteur-de-recherche-ia-de-google-boude-la-france-lai-mode-est-disponible-dans-toute-leurope-sauf-ici.html

Author

Youssef Jlidi

Consultant SEO & GEO, passionné d'IA.

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